Les discussions pour élargir le périmètre des CEE (certificats d’économie d’énergie) aux sites soumis aux quotas ETS ne sont pas nouvelles mais les choses deviennent de plus en plus concrètes avec la diffusion du contenu de la loi PACTE en mars dernier. En effet, elle prévoit des conditions précises de valorisation des opérations d’économies d’énergie pour les sites soumis au quota CO2.
Avant d’entrer dans le détail des assouplissements de ces règles, revenons aux bases :
Que sont les quotas ETS ?
Les quotas EU-ETS pour European Trading Scheme, ont été instaurés en 2005 pour réguler les émissions de CO2 des sites industriels européens ayant des consommations très importantes. Ces derniers se voient attribuer un volume d’émissions à ne pas dépasser sur une période donnée sous peine de pénalité. Les industriels peuvent échanger des volumes d’émissions sur le marché : ainsi ceux qui ont réduit leurs émissions peuvent revendre leurs « droits à émettre » à ceux qui dépassent leur allocation, et peuvent ainsi générer des gains financiers.
Le système ETS est donc un moyen pour les sites très émetteurs de dégager des bénéfices grâce à leurs actions d’efficacité énergétique. C’est pour éviter la redondance avec les CEE que ceux-ci leur sont interdits.
Pour être plus précis, les sites soumis aux quotas ETS ne sont pas totalement exclus du système des CEE mais ils ne peuvent pas en bénéficier pour valoriser des opérations de performance énergétique qui permettent de réduire les consommations de leurs installations classées.
Prenons l’exemple d’un site industriel dont la chaufferie est soumise aux quotas ETS.
L’isolation de points singuliers sur les conduites de vapeur, produite par la chaudière classée, est non éligible car les émissions produites par celle-ci diminuent suite à cette action.
En revanche, le relamping ou la mise en place de variation de vitesse sur un compresseur d’air comprimé sur ce même site sont éligibles car ils n’ont pas d’impact sur les consommations des installations soumises aux quotas ETS. En effet, ici seules les consommations d’électricité sont impactées par les mesures entreprises.
Des assouplissements attendus
A l’heure où les obligations CEE sont très élevées et les gisements manquent, la problématique de la compatibilité des CEE et du système ETS revient sur le devant de la scène. D’autant plus que d’autres pays européens permettent déjà de cumuler les aides financières sur les opérations d’économies d’énergies et les quotas ETS. Néanmoins, loin de la manne espérée, le potentiel de gisement CEE fait débat. Malgré une consommation représentant 10% de la consommation française en Metp, les experts estiment un gisement allant de 40 TWh cumac pour les plus réservés jusqu’à 240 TWh cumac pour les plus optimistes.
Les assouplissements des règles sur le cumul des quotas ETS et CEE entrainent des craintes de la part de la DGEC et certains acteurs :
– La déstabilisation du dispositif des CEE avec l’arrivée sur le marché d’un nouveau gisement important.
– Un effet d’aubaine avec le cumul des deux financements qui résulterait en un temps de retour très faible, voire une prime supérieure aux investissements.
– La présence de doublons dans le comptage des économies d’énergies réalisées par les entreprises françaises, pour lequel la DGEC doit rendre des comptes à Bruxelles.
Pour pallier ces risques, l’ouverture va d’abord être restreinte et très encadrée pour déterminer, au vu des retours d’expériences, si un aménagement plus souple pourra être mise en place.
Des demandes sous forme de dossiers CEE spécifiques
Tout d’abord, les sites devront être éligibles à l’affectation de quotas CO2 à titre gratuit c’est-à-dire tous les secteurs excepté la production d’électricité. De plus, ils devront être certifiés ISO 50001 pour garantir la qualité du mesurage nécessaire pour constituer le dossier technique des opérations spécifiques. La certification étant obtenue au plus tard à la date d’achèvement des travaux.
Les dossiers de demandes CEE devront être des opérations CEE spécifiques. Cela implique le montage d’un dossier technique afin de décrire le contexte, la situation de références et de justifier les économies d’énergies réellement obtenues, dans le but de permettre à la DGEC d’avoir une documentation précise des opérations valorisées. Le temps de retour brut devra être supérieur à 3 ans en prenant en compte les revenus des ETS et la prime CEE pour réduire les effets d’aubaine.
Le dossier technique devra inclure un plan de mesure justifié et une durée de mesurage suffisamment longue pour être représentative afin de confirmer les économies d’énergies pressenties. La période de mesurage fixée à 6 mois et les dossiers devront être transmis au PNCEE maximum 3 mois après la période de mesurage (au lieu des 12 mois après l’achèvement des travaux pour les opérations spécifiques habituellement).
Afin de simplifier les demandes que ce soit au niveau de la constitution des dossiers ou leur instruction, il est prévu que l’ADEME et l’ATEE établissent des règles, appelées Lignes Directrices Harmonisées (LDH). Ces LDH permettront de définir un cadre commun pour faciliter la valorisation des opérations réplicables.
A retenir :
Seuls les sites certifiées ISO 50001 pourront déposer des demandes
Les CEE seront cumulables avec les gains apportés par le système
L’assouplissement des règles est ouvert uniquement aux opérations spécifiques
Concerne les opérations engagées à partir du 01/01/2019